17 octobre 2016. Épaulées par l’aviation de la coalition internationale, les troupes irakiennes se lancent dans la plus grande bataille urbaine jamais livrée depuis la Seconde Guerre mondiale : la reprise de Mossoul, ville abandonnée aux ogres de l’État islamique depuis deux ans. Les forces spéciales de la Golden Division, enfantée par l’armée américaine pendant la guerre en Irak en 2003, sont en première ligne. Lorsque l’offensive est lancée, Alvaro Canovas est auprès de ces hommes. À six reprises, pendant ces longs mois, le photographe a accompagné les soldats irakiens dans leur lutte contre les djihadistes. « C’est en quelque sorte le bien contre le mal, dit-il. À chaque voyage, j’avais une pensée pour mon copain Pierrot, assassiné au Bataclan. J’ai voulu suivre ces soldats jusqu’à leur victoire. » Paris Match lui a donné l’opportunité de le faire. Durant des semaines, il reste à leurs côtés, toujours au plus près de ceux qu’il photographie, avec sa bienveillance, son humour savoureux et son instinct sûr. Il est attaché à ce pays qu’il a finalement toujours connu rongé par la guerre, déjà présent lorsque les Américains l’ont envahi. À presque cinquante ans, et depuis qu’il exerce son métier de photographe, peu de révolutions, peu de guerres lui ont échappé. Mais jamais, confiera-t-il à son retour, il n’a couvert de combats si dangereux.

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Les militaires irakiens ont affronté une résistance féroce, un déluge de feu dans la poussière et la lumière éblouissante du soleil du Levant. Toutes les armes s’y mêlent : kalachnikovs, mines, missiles largués depuis les avions de la coalition, voitures-suicides. Des véhicules bourrés d’explosifs, parfois munis de blindage de fortune. Alvaro Canovas photographie cette lente traque, balayé par les rafales, soufflé par le blast des bombes. Le bataillon qu’il accompagne progresse méthodiquement, de maison en maison, porte après porte, étage après étage. Face à eux, les soldats noirs de Daech, cruellement déterminés, avancent arme au poing, se défendent pied à pied. Dans ces rues jonchées de gravats et asphyxiées par l’odeur âcre de l’essence brûlée, chaque pas peut être mortel. Les combats détruisent la ville que la population, dans le précipice de la guerre, tente de fuir. Le photographe croise des milliers de Mossouliens pétrifiés. Il insiste cependant sur un point : « Contrairement aux armées syrienne et russe, les soldats irakiens ont toujours pris en considération le sort des civils. » La bataille est périlleuse, surtout meurtrière. Plusieurs des hommes qu’Alvaro Canovas a suivis ont perdu la vie ou sont aujourd’hui grièvement blessés. Ce travail photographique et documentaire leur rend un hommage sincère.

Émilie Blachere

Alvaro Canovas

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© Alvaro Canovas
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