Quand le navigateur portugais Pedro Cabral atteint la côte sud-américaine en 1500, il y avait entre 1 et 11 millions d’Indiens dans ce qui est maintenant le Brésil. 500 ans plus tard, il en survit quelque 300 000. La guerre, l’esclavage, la famine et les maladies, causés par les envahisseurs sont responsables de cette hécatombe. Les menaces actuelles pour ces Indiens sont les fermiers, les chercheurs d’or, les braconniers, et autres étrangers qui incitent à la violence, dégradent la vie traditionnelle et apportent des maladies souvent bénignes pour nous, mais contre lesquelles les Indiens ne sont pas immunisés. Plus d’un dixième du territoire brésilien sont des terres indiennes protégées par la loi, même si cette protection n’existe que sur le papier.

Alors que souvent, l’assimilation de ces ethnies est désastreuse, certaines désirent un contact plus ou moins régulier avec le monde extérieur, le monde “ moderne “. Il existe en Amazonie brésilienne encore au moins une trentaine de groupes d’Indiens non-contactés, dans des régions reculées. C’est le dernier endroit au monde où il existe encore des tribus n’ayant aucune relation avec notre civilisation.

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Sans contacts avec notre civilisation, elles vivent en toute quiétude. Jusqu’à quand ? Terriblement menacées par l’avancée du monde moderne, elles sont en sursis. Bien que certains programmes en place tentent de les protéger des déprédations du progrès, l’heure est à la globalisation. Une guerre acharnée et intransigeante que mène les lobbies de tout crin au détriment des droits de l’homme. Les indigènes vivent sur des terres enviées recelant hydrocarbures, minerais et bois… Les ethnies, elles-mêmes, sont détentrices d’un savoir qui attise les convoitises.

Les puissants laboratoires pharmaceutiques sont désormais intéressés par la pharmacopée traditionnelle pour en exploiter les nouvelles molécules. Sans compter que ces zones habitées sont d’hypothétiques destinations touristiques que certains sont prêts à posséder pour en faire profit… L’isolement des territoires de ces tribus est une manne pour les narco-trafiquants. Au sein du gouvernement brésilien, un département de la Funai (bureau des affaires Indiennes brésilien) est voué à la protection des tribus isolées du pays. Ce département est dirigé par un homme, Sydney Possuelo. En 2002, Sydney Possuelo monte une expédition afin de reconnaître la terre vitale des Indiens Flecheiros, une tribu non-contactée vivant dans le haut-Amazone, dans la région de Vale do Javari, proche des frontières du Pérou et de la Colombie. Ces Indiens ne sont pas encore menacés par la société brésilienne, mais il est important de protéger leurs terres, donc de savoir la superficie qu'il leur est nécessaire pour vivre.

34 hommes faisaient partie de cette aventure. Des gens de la FUNAI, des "caboclos" ou blancs de la jungle, et 20 Indiens de 3 tribus différentes, les Matis, les Marubo et les Kanamari. Ces derniers étaient essentiels afin de pouvoir "lire" les indices trouvés tout au long de notre périple. Indices qui nous renseignèrent, petit à petit, sur les us et coutumes des Flecheiros.

J'ai suivi cette expédition qui a duré plus de 3 mois dans la jungle, pour le magazine américain National Geographic. L'exercice le plus dur, pour un photographe, fut, que pendant toute cette expédition, je n'ai jamais vu mon sujet principal : les Indiens non-contactés !

Nicolas Reynard

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