Avoisinant parfois les 120 mètres de hauteur et les 2 000 ans d’âge, les séquoias de la côte californienne sont les plus grands arbres du monde. En un siècle, nous avons abattu 95 % de la plus grande forêt du monde et laissé derrière nous un héritage de cours d’eau pollués et de terres mutilées. La coupe des arbres anciens est devenue chose courante depuis le rachat de Pacific Lumber, autrefois une entreprise familiale respectueuse des principes du développement durable, par des magnats de Wall Street. Un appât du gain qui allait ravager l’économie locale, dépendante en bien des façons de la forêt.

Sans personne pour désigner un coupable, la situation s’est aggravée jusqu’à l’éclatement d’une véritable guerre du bois. L’histoire de Julia Butterfly Hill, qui a vécu deux ans sur un séquoia surnommé « Luna », a défrayé la chronique. Quand cette guerre s’est enfin essoufflée, le taux de chômage avait atteint des niveaux sans précédent dans les villes côtières du nord de la Californie. Les tensions subsistent entre écologistes et bûcherons, mais, pour l’heure, les derniers séquoias géants ont été sauvés.

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Note sur notre grand assemblage photo. Dans son ouvrage Tree, James Balog a été le premier à montrer des images de séquoias entiers. Pour ce faire, il a créé une mosaïque de différentes images prises au bout d’une corde, appareil en main. Quant à nous, nous devions trouver une façon de montrer l’arbre dans son intégralité, mais sans distorsion, pour une publication dans le magazine National Geographic. Je travaillais avec la même équipe qui avait guidé et encadré James. Or, puisque je me considère être un pionnier de la photographie, je déteste arriver deuxième. Je ne pouvais pas simplement singer la technique de Balog parce qu’il m’aurait été impossible d’assembler les images sans distorsion. J’en ai fait des cauchemars pendant plus d’un an. Jusqu’au jour où Jim Spickler nous a sortis de l’impasse en proposant d’accueillir la technologie à bras ouverts et d’utiliser un chariot de travelling commandé par ordinateur, bien plus précis que mes mains de photographe.

Après trois semaines d’essais, et au cours d’une heure de glorieuse perfection, nous avons réussi à prendre les 84 images qui, après 120 heures de remaniement par Ken Geiger, rédacteur photo au magazine National Geographic, allaient donner l’assemblage final. Au-delà des efforts requis ou de la technique utilisée, ce qui importe est que cette image nous fasse prendre conscience de la fragilité de ce géant qui, du haut de ses 1 500 ans d’existence, aurait très bien pu être abattu.

Michael “Nick” Nichols

Publié dans le magazine National Geographic d’octobre 2009.

Michael Nichols

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© Ian Nichols
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