Lauréate du Prix Camille Lepage 2018

L’intégrité physique, considérée comme une autonomie personnelle et l’autodétermination de l’être humain sur son propre corps, est un droit fondamental. Pourtant, à travers le monde, des femmes se voient refuser ce droit en raison d’un manque d’accès à la contraception et à l’avortement médicalisé.

Dans les pays où la tradition et la religion font office de lois, ces droits sont parmi les plus difficiles à défendre et peuvent être une source majeure de stigmatisation sociale. L’accès à l’avortement est une question de politique et de pouvoir : qui peut décider du droit à la fécondité et à la procréation de la femme ?

Bien que des procédures sûres existent pour l’interruption médicale de grossesse, 164 femmes en moyenne meurent chaque jour des suites d’avortements à risque et illégaux (selon l’Organisation mondiale de la santé), et près de 90 % vivent dans les pays en développement. Chaque année, plus de 25 millions d’avortements, soit la moitié de toutes les procédures recensées dans le monde, sont considérés comme dangereux.

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Sans accès aux centres de santé pratiquant les IVG et souvent privées des méthodes modernes de contraception, peu informées sur la sexualité féminine et la procréation, ces femmes sont obligées de mener à terme leur grossesse non désirée et parfois dangereuse, ou alors doivent recourir à des solutions à haut risque. La plupart de ces femmes sont mineures, victimes de viol ou atteintes de pathologies. Les études montrent que les législations restrictives n’empêchent pas les avortements mais empêchent l’accès des femmes à des soins de santé de qualité et représentent donc un risque pour elles, notamment pour les femmes pauvres et sans instruction. De telles lois entraînent des taux de mortalité maternelle plus élevés, en moyenne trois fois plus élevés, que dans les pays où l’avortement est légal. En 2019, l’IVG est toujours interdite ou extrêmement restreinte dans 123 pays. Aujourd’hui, un siècle après l’octroi du droit de vote aux femmes dans certains pays, les droits des femmes sont encore menacés, y compris dans les nations développées telles que la Pologne, l’Italie et les États-Unis, pour n’en citer que trois, où les lois que l’on pensait bien établies sont fragilisées. J’ai réalisé ce reportage non seulement pour raconter l’histoire de ces femmes, mais également pour rappeler que le changement n’est complet et permanent qu’une fois qu’il est accessible à tous et compris et accepté par la majorité.
Kasia Strek

Certains noms de personnes et de lieux ont été modifiés pour protéger les femmes dont il est question dans le reportage. Le reportage sur l’Égypte a été financé par le Prix Camille Lepage (2018). Le reportage sur le Salvador a été financé par la bourse de la Fondation Jean-Luc Lagardère.

Kasia Strek

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