21 312*. Un nombre qui devrait faire bouger les lignes. Pourtant rien.
21 312, c’est le nombre, sous-évalué, de personnes mortes en Méditerranée centrale depuis 2014, année où l’Italie a mis fin à l’opération humanitaire Mare Nostrum chargée de porter secours aux migrants. Un nombre qui fait de la Méditerranée la route migratoire la plus meurtrière au monde.

Pour pallier l’inaction de l’Union européenne, des ONG ont décidé d’affréter des bateaux de sauvetage. Leur mission : venir en aide aux milliers de personnes qui, chaque année, tentent la dangereuse traversée de la Méditerranée sur des embarcations de fortune depuis les côtes nord-africaines et la Turquie afin de rejoindre l’Europe pour y demander l’asile.

En mer, que ce soit à bord de l’Ocean Viking, le navire de sauvetage de SOS Méditerranée, ou du Geo Barents, celui de Médecins sans Frontières, le credo est le même : s’entraîner encore et toujours pour porter assistance aux bateaux en détresse avec à leur bord des enfants, des femmes et des hommes qui fuient en quête d’une vie meilleure.

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À terre, les politiques migratoires européennes agissent comme des remparts en refusant d’ouvrir des voies légales pour ces personnes. Épaulée par Frontex, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, et son budget de 750 millions d’euros en 2022, la forteresse Europe déploie arsenal militaire et législatif pour empêcher les franchissements de frontières terrestres comme maritimes : drones, avions, bateaux, centres de rétention administrative, décrets criminalisant le travail des ONG. L’Europe ne cesse de se réinventer pour lutter contre ce que l’on appelle l’immigration illégale ou irrégulière.

Dernier exemple en date, l’Italie, où le gouvernement d’extrême droite de Giorgia Meloni a voté en janvier 2023 un décret obligeant les navires humanitaires à rallier immédiatement un port de débarquement après chaque sauvetage. Ces ports, désignés par les autorités italiennes, sont de plus en plus éloignés des zones de recherche. Une contrainte qui essouffle économiquement les ONG, obligeant celles-ci à de longs périples et des allers-retours interminables entre les ports et la zone de sauvetage. L’objectif est limpide : faire perdre du temps et de l’argent alors que les tentatives de traversée ne s’arrêtent pas.

À l’heure où vous lisez ce texte, en France le Parlement s’apprête à examiner un projet de loi sur l’immigration. Espérons que le pays des droits de l’homme n’éteigne pas ses lumières.

Michael Bunel

Une partie de ces photographies a été produite dans le cadre de la grande commande nationale "Radioscopie de la France : regards sur un pays traversé par la crise sanitaire" financée par le Ministère de la culture et pilotée par la BnF

Michael Bunel

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Anne-Charlotte Compan
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