De ce temps « maître absolu des hommes » qu’évoquait William Shakespeare en son dix-septième siècle, que reste-t-il aujourd’hui ? Quelques milliards de secondes et un flot d’images ininterrompu, comme si le monde lui-même, dans son immensité, voulait donner de ses nouvelles, du village perdu dans la jungle à la Silicon Valley, des bidonvilles aux territoires enflammés par la guerre, des terrains de football aux buildings de verre blindé qu’affectionnent les hommes au pouvoir.

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L'actualité est une question de tempo, chacun son tour, de vie et de mort, toujours, et les photographes sont les premiers à s'en saisir. Ceux de Reuters le savent bien, du plus humble des pèlerins à la plus pensive des prostituées, de l'enfant dormant aux jeunes recrues impassibles de l'armée indienne, rien n'est impossible à photographier, tout peut rentrer dans l'objectif : du sang, des larmes, de la sueur et de la peur ; et même le regard silencieux d'un adolescent tout à coup ébloui par ses propres rêves.

Alors, ils s'immobilisent et concentrent en une image unique, en un seul mouvement, un raccourci tranchant d'une histoire sans fin. D'un arrêt sur éternité : one shot, comme la dernière cigarette du condamné, comme le rideau rouge qui se déploie au début du spectacle, comme un éclat de rire entre amis, juste avant la nuit. Juste avant que ceux de Reuters ne décident d'envoyer à la terre entière ces morceaux de vies inconnues qu'ils ont choisi de prendre avec tant d'attention.

Brigitte Ollier

Collectif de photographes Reuters

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