Une terre brûlée, cuite par un soleil sans pitié. Une terre d’un rouge intense de désert martien; et sur cette terre rouge, des squelettes, des millions de squelettes d’arbres, d’arbustes, de buissons et aussi, aussi, des millions de carcasses d’animaux, chèvres, vaches, dromadaires tombent lentement en poussière, en cendres pourrait-on dire… Des millions de vies de femmes, d’hommes et d’enfants, transformées à jamais; orphelines de leur autre famille, celle qui fait vivre et prospérer depuis des temps immémoriaux ces populations d’éleveurs semi-nomades dans cette corne de l’Afrique, berceau de l’humanité, cette autre famille, c’est leur cheptel. Quatre ans.

stevens_secheresse_039.jpg
stevens_secheresse_045.jpg
stevens_secheresse_017.jpg
stevens_secheresse_022.jpg

Depuis quatre ans il n’a pas plu, ou pas plu suffisamment, dans ces régions isolées du nord-est du Kenya et du sud de la Somalie et de l’Ethiopie, une zone de la taille de la France, parsemées de clans semi-nomades d’origine somalie. Près de quatre millions de personnes dont les moyens de subsistance se meurent, sont épuisées par le manque d’eau, de pâturages favorables et les distances toujours plus grandes à parcourir entre les rares puits toujours actifs. La Corne de l’Afrique est aussi le théâtre de conflits incessants, dans lesquels les grandes puissances comme par exemple les USA en Somalie jouent un rôle complexe, souvent trouble, dans lesquels les rivalités ou simples différences ethniques entre les gouvernements de la région et les populations concernées –au Kenya notamment- relèguent la gestion d’une crise humanitaire majeure loin de la priorité qu’elle mérite. De rares acteurs humanitaires, le Programme Alimentaire Mondial des Nations Unies et une petite poignée d’ONG tentent de venir en aide à une population fragilisée par la perte, probablement définitive, de son mode de vie ancestral, dans l’indifférence assourdissante des gouvernements et médias occidentaux.

Bruno Stevens

portrait_stevens1.jpg
Voir les archives