Le léopard de mer Ce cétacé souffre depuis toujours d’une très mauvaise réputation. Au début du siècle dernier, Shackleton signalait que ses hommes en subissaient les attaques fréquentes. De nos jours, il leur arrive de crever des bateaux pneumatiques d’un coup de dent pointue. Au cinéma, dans La Marche de l’Empereur ou Happy Feet, les rôles de méchants leur reviennent d’emblée. En 2003, lors d’une investigation sous-marine, une scientifique britannique a, en effet, trouvé la mort, noyée sous les assauts d’un léopard de mer. Serait-ce un incident isolé ou bien le léopard de mer est-il vraiment devenu un danger pour les humains ? En tant que journaliste naturaliste, j’ai toujours pensé que l’on jugeait souvent le caractère des animaux dans des circonstances extrêmes. Pour en avoir le cœur net, accompagné de mon collègue Goran Ehlm, j’ai nagé trois semaines de suite parmi un très grand nombre de léopards de mer. Au bout de plus d’une trentaine de rencontres aquatiques avec ces bêtes magnifiques, je peux affirmer qu’à aucun moment je ne me suis senti en danger. A vrai dire, une femelle dominante de taille exceptionnelle (quatre mètres de long, cinq cents kilos) m’a pris en amitié. Quatre jours d’affilée, elle s’est mis en tête de me nourrir de pingouins. Après quelques démonstrations classiques d’intimidation au cours desquelles mon appareil photo disparaissait entre ses énormes mâchoires, elle s’est lancée dans la capture de pingouins pour me les offrir, morts ou vifs. Devant mes refus répétés, déçue par mes piètres aptitudes à la chasse et à la dégustation, elle s’est enfin lassée de déposer ses proies sur mon crâne et mon appareil photo.

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Les narvals Seuls animaux du globe à être dotés d’une corne spiralée en ivoire, les narvals restent associés aux légendes de la licorne. Leur unique défense peut atteindre jusqu’à trois mètres de long. Le cycle de vie de ces cétacés se déroule entièrement dans un univers glacé grâce à leur système d’écholocalisation qui leur permet de naviguer à travers les étroits chenaux et méandres de la banquise. Malheureusement, les narvals font l’objet d’une traque impitoyable en raison de l’ivoire de leurs précieuses défenses, lesquelles sont majoritairement destinées au marché noir européen. La population des narvals connaît depuis peu un déclin dramatique, très probablement en raison des ratios liés aux pratiques de chasse lamentables – cinq bêtes au moins sont coulées pour une capturée. Il s’agit ici d’encourager le gouvernement canadien à mieux gérer cette ressource unique en voie d’épuisement.

Le recul de la banquise Nous sommes certains à présent de vivre en plein réchauffement climatique. Pendant un temps, on s’est interrogé sur sa réalité et sur ses véritables causes. Désormais le doute n’est plus permis et un rapport récent des Nations unies révèle qu’il est à 90% imputable à l’homme. Le réchauffement prévaut surtout aux deux pôles. Plutôt que de m’adresser directement au public, j’ai choisi d’en illustrer la menace par des photographies prises en Arctique de toutes les créatures remarquables que nous allons perdre ou qui souffriraient si la fonte et le recul de la banquise devaient se poursuivre à un rythme aussi alarmant. Un exemple, selon les prévisions scientifiques, les ours polaires pourraient disparaître au cours des cent prochaines années. Faute de banquise, ils ne pourront plus chasser. Leur disparition entraînerait celle de tout un écosystème : une calotte glaciaire sans glace serait comme un jardin sans terreau.

Paul Nicklen

Paul Nicklen

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