À quoi sert une photographie politique ? À rien ou beaucoup. Tout dépend de la sincérité de son auteur. Une image ne dit jamais la vérité, mais on peut éviter de la faire mentir. Je ne raconte plus la politique comme une comédie depuis que je me suis rendu compte que j’avais devant moi des personnages de tragédie. Pas ces notables qui se limitent aux mandats de député ou aux portefeuilles de ministre, mais ces quelques femmes et hommes qui mettent en jeu leur vie, leur nom, pour partir à la conquête d’un pouvoir suprême qu’ils ne redoutent pas d’endosser. Ceux-là ne lâchent jamais.

Le journal Le Monde me permet de suivre les grands politiques, inlassablement, au plus près, pour capter ces moments d’euphorie, de fatigue ou de doute qui aideront à dresser leur portrait. Cette rédaction où règne la force du verbe assume depuis une quinzaine d’années la fragilité de mes images.

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Je ne peux photographier la politique que pour un journal. Il n’y a pas de photographie universelle, il faut savoir à qui on s’adresse. Je connais aussi bien le lecteur du Monde que je connaissais celui de Libération dans les années 1980. Travailler pour une rédaction permet également d’échapper à la pression des communicants, ceux qui font du photojournalisme politique un photojournalisme captif, réduisent les espaces et les temps de prises de vue, nous ramènent vers les axes officiels et nous remplacent par des photographes maison. Ainsi je photographie aussi la politique pour ne pas laisser la communication l’emporter sur le réel.

Jean-Claude Coutausse

Jean-Claude Coutausse

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© Stéphane de Sakutin/AFP
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