Après l’effondrement de l’Union Soviétique, l’euphorie initiale et la gloire de l’indépendance ont cédé le pas à une profonde introspection sur ce que signifie être azéri et sur l’orientation à donner au pays : Etat islamique laïc, nouvelle démocratie avec économie de marché ou bien dictature retranchée en marge de l’Europe ? Pris entre les intérêts géopolitiques divergents de l’Occident, de la Russie et de l’Iran, depuis des années, les Azéris tentent de comprendre qui ils sont. Une guerre contre son voisin l’Arménie a accentué les difficultés de ce nouvel Etat et fragmenté l’identité nationale. Azéri est devenu synonyme de réfugié. En dépit du cessez-le-feu, l’Azerbaïdjan reste un pays occupé dans lequel, tous les mois, des villageois proches du front tombent sous les balles de francs-tireurs. Près d’un million de réfugiés et personnes déplacées par le conflit vivent encore une vie qui n’est pas la leur dans une misère accablante, dans des wagons de train abandonnés, des baraques en terre ou des cavités creusés dans le sol.

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En 1994, le gouvernement azéri a signé “le contrat du siècle” avec onze compagnies pétrolières dirigées par un conglomérat BP (British Petroleum). Depuis, les dirigeants au pouvoir se sont enrichis au-delà de toutes leurs espérances alors que l'Azéri moyen n'a toujours pas vu se concrétiser ces belles promesses de prospérité, si ce n'est par l'altération rapide du paysage à Bakou, résultat d'un boom sauvage de la construction qui a balayé des quartiers historiques pour les remplacer par de luxueuses tours d’habitation. Les multinationales pétrolières ont débarqué dans ce pays caractérisé par une corruption endémique, la pauvreté, le chômage et une catastrophe humanitaire héritée de la guerre. Bien que les investissements pétroliers aient permis à l'économie de se développer, l'écart entre les riches et les pauvres s'est creusé et il n'est quasiment plus possible de trouver un emploi en dehors des centres urbains. Des capitaux sont investis massivement dans les champs pétrolifères offshore de la mer Caspienne, plus rentables, alors que l'infrastructure pétrolière terrestre datant du siècle dernier est laissée à l'abandon, se désagrège et transforme le paysage en terrain vague dantesque. A Bakou, capitale de l'Azerbaïdjan, après l'indépendance, un couvre-feu militaire interdisait aux habitants de sortir après minuit ; aujourd’hui, Bakou est une ville animée avec une vie nocturne à part entière. Avec l'arrivée de cultures et d'investissements étrangers, les bars et les restaurants se sont multipliés pour mieux servir les rares couches de la société qui ont profité du boom pétrolier. Pourtant, alors que les spots des night-clubs de Bakou illuminent le ciel, dans les villages azéris, les gens vivent sans gaz ni eau courante et ne profitent que de quelques heures d'électricité par jour.

Rena Effendi

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