Venice, Californie
Karen Ballard
Un portrait du quartier mythique et décalé de Los Angeles, longtemps connu comme un paradis bohème, un vivier artistique et une plage publique, un lieu où l’esthétisme, le surf, la richesse et les dures réalités de l’Amérique du XXIe siècle coexistent. Au cours de la dernière décennie, la légendaire Venice (alias Venice Beach) a lentement évolué, d’un passé riche en histoires à un présent coloré, complexe et moderne.
Venice est un quartier de Los Angeles fondé le 4 juillet 1905 par Abbot Kinney, un écologiste rêveur qui avait remporté un pari et ainsi gagné de vastes espaces marécageux au sud de Santa Monica. Son projet consistait à créer une station balnéaire avec une certaine dimension culturelle pour en faire la « Venise des États-Unis », avec des canaux et des gondoles, ainsi qu’un parc d’attractions sur la jetée donnant sur l’océan Pacifique. Presque tout a disparu aujourd’hui ; la jetée d’origine a été détruite par un incendie il y a des années et il ne reste que quelques canaux, mais il faut reconnaître que le rêve d’Abbot Kinney a perduré. Des millions de personnes visitent Venice Beach chaque année, ce qui en fait la deuxième attraction touristique la plus populaire de Californie du Sud après Disneyland.
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Au fil des années, stars de cinéma, artistes, écrivains, gangs, marginaux, hipsters d’aujourd’hui, tous ont vécu à Venice. Des longs métrages, des publicités et des émissions de télévision y ont été tournés dès 1914, notamment Charlot est content de lui de Charlie Chaplin, jusqu’en 2023 avec le tout dernier blockbuster Barbie. Pour certains, la plage évoque surtout « Muscle Beach », où des culturistes comme Arnold Schwarzenegger et Lou Ferrigno venaient s’entraîner. Venice a également la réputation d’être un paradis d’insouciance, où les Doors ont débuté avec Jim Morrison dans les années 1960. Puis la mode du skateboard est arrivée et c’est devenu « Dogtown, USA » dans les années 1970.
Plus récemment, pour une partie des 40 000 habitants, la révolution technologique, la gentrification et la richesse associée sont venues assombrir l’esprit de la ville balnéaire. Des écarts de salaires toujours plus marqués, des loyers qui explosent et une importante population de sans-abri toujours plus nombreuse depuis la pandémie ont totalement bouleversé l’équilibre de Venice. Déambuler dans la rue peut parfois devenir un slalom où il faut se frayer un chemin entre les sans-abri tandis qu’un peu plus loin la police tente de maintenir l’ordre. Mais il y a toujours quelque chose de nouveau à voir et à essayer, comme sur le très branché boulevard Abbot Kinney où l’on peut déguster les glaces véganes d’un grand chef.
Jamais je n’aurais imaginé qu’après quinze ans, le projet connaîtrait encore une nouvelle transition. Les inégalités et la richesse observées à Venice sont aujourd’hui un phénomène courant dans toute l’Amérique du XXIe siècle. Venice continue d’évoluer, et l’ensemble de ce travail constitue une étude visuelle et une référence au passé et à l’avenir de la ville.
Karen Ballard
6 mai 2024