Lauréat·e : Visa d'or de la Ville de Perpignan Rémi Ochlik 2022

5h30, Moscou, le 24 février 2022. Vladimir Poutine, assis derrière son bureau, annonce le lancement d’une opération militaire spéciale en Ukraine. Dans la foulée, les premiers missiles s’abattent sur le sol ukrainien, alors que le président Volodymyr Zelensky appelle le pays à prendre les armes. En quelques instants, la vie de millions d’Ukrainiens et Ukrainiennes bascule à jamais.

Dans un hôpital de Kiev, une mère dort depuis trois mois au chevet de son fils dont la jambe, fauchée par un obus, a été amputée. Dans les ruines de Borodyanka, une vieille femme demande son chemin aux passants, perdue dans sa propre ville. À Lviv, un conservateur regarde les murs vides de son musée, tandis qu’une mère pleure son deuxième fils tombé au combat.

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Au-delà de la perte d’un territoire, c’est aussi la destruction d’un pays, de son identité, de son patrimoine, de son économie. Il y a ceux qui n’ont d’autre choix que de fuir et ceux qui décident de rester. Une vie dans les abris souterrains ou les wagons bondés, rythmée par les sirènes, où la mort vient du ciel. Et le traumatisme de la guerre qui s’immisce dans les esprits. « J’ai vu une vidéo de soldats russes en train de brûler et j’ai ri. L’espace d’un instant, je ne me suis plus reconnue, tout avait changé. Je ne me pensais pas capable de ça… », raconte Alina, une habitante de Kiev.

À travers ces images réalisées en commande pour le journal Le Monde de mars à mai, j’ai voulu montrer le quotidien de la guerre et son impact sur la population, en documentant cette vie totalement bouleversée mais qui continue malgré tout. On se rend compte que la guerre ne se résume pas aux missiles et à la destruction : elle impacte les vies de millions de personnes, piégées pour certaines dans leurs propres immeubles, leurs propres villes, leur propre pays. Alors même que l’information est détournée, transformée, instrumentalisée, montrer la réalité de la guerre devient indispensable.

Sur le terrain, il y a ceux qui nous aident, fixeurs, médecins, volontaires, soldats, tous ceux qu’on laisse derrière nous quand on repart. Il y a l’attente, l’ennui, la peur, le doute, l’absurdité, la vie, la mort. Les images ne représentent en définitive que des fractions de seconde du quotidien sur place, où la guerre, elle, est présente en permanence.

Lucas Barioulet

Lucas Barioulet

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