Sierra Leone : l'ultime offensive des Kamajors

C’est l’histoire singulière et héroïque de quelques centaines de chasseurs traditionnels Kamajors qui décident de reconquérir leur province de Kono. Les rebelles du RUF (Front Révolutionnaire Uni) y sont installés depuis dix ans, après l’avoir pillée et en avoir chassé brutalement la population pour exploiter les gisements de diamants.

Les Kamajors vivent dans des camps de réfugiés en Guinée, partageant l’hospitalité contrainte de la population locale, jusqu’à ce que les rebelles lancent des raids de pillage à l’intérieur même de ces camps, semant la désolation parmi les villageois, provoquant la fureur des militaires guinéens et l’arrêt des distributions de nourriture de l’UNHCR et des ONG.

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Les Kamajors réagissent alors. Dotés d’une structure de commandement et de quelques armes de chasse, ils décident de poursuivre les rebelles pour les éloigner de la frontière. Ils sont eux-mêmes surpris de leur propre efficacité et récupèrent armes et munitions. Ils lancent alors une vaste offensive dont l’objectif est de reprendre leur capitale régionale, Koidu. Ils marchent pendant quatre semaines ; s’organisent en plusieurs “ colonnes ”. Leur éthique leur interdit toute exaction sur leur route.

Ils sont arrêtés alors qu’ils approchent de leur but, et donc de l’affrontement avec les rebelles du RUF, par un hélicoptère de l’UNAMSIL, Mission de l’ONU pour la Sierra Leone. Cette délégation tente de les dissuader d’aller plus loin.

Les Kamajors arrivent bien à Koidu, mais dans des véhicules de l’UNAMSIL. Empêchés par l’ONU d’aller au combat, ils sont désarmés unilatéralement contrairement à la promesse qui leur a été faite. Le photographe est exfiltré par l’ONU pour ne pas assister au désarmement.

Partis d’un camp au nord, les guerriers Kamajors sont parqués dans un camp au sud. Pendant ce temps, les rebelles du RUF continuent à exploiter les mines de diamants avec la complaisance de l’ONU.

A défaut de s’opposer fermement aux rebelles qui règnent par la terreur sur le pays, la Mission de l’ONU pour la Sierra Léone, en fait l’ex force d’interposition africaine ECOMOG menée par le Nigeria qui a obtenu un mandat de l’ONU, se compromet avec eux et leur donne par la paix ce qu’ils n’ont pas obtenu par la guerre. En empêchant les patriotes de résister, l’UNAMSIL donne l’avantage aux plus forts, humiliant un peu plus leurs victimes.
Les Kamajors sont organisés comme une société secrète initiatique avec des rites très spécifiques qui trouvent leur origine dans les profondeurs de la spiritualité africaine. Cette spiritualité est constituée de trois composantes : les Ancêtres, les Esprits et Dieu. Ils pratiquent une magie qui leur donne des pouvoirs surnaturels mais qui ne peut rien contre la volonté de Dieu. Ils utilisent l’eau comme vecteur de ces pouvoirs qui leur assurent une immunité contre les balles et l’adversité. Ils récitent chaque jour au lever et au coucher du soleil une longue prière islamique et chrétienne accompagnée de chants rituels dans leur langue ethnique, le Kono. Ils sont respectés et admirés par la population.

Avril-mai 2001 - Sierra Leone – Guinée