Même avant le 12 janvier 2010, Haïti (qui occupe le côté ouest de l’île d’Hispaniola, à côté de la République dominicaine, à l’est) était le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental, avec 80 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté et 54 % dans la misère. La corruption, la violence et le crime organisé y sont endémiques. Je me suis rendu en Haïti pour la première fois en janvier 2010, quelques jours après le tremblement de terre désastreux. Dès mon arrivée à Port-au-Prince, la capitale, j’ai constaté que des quartiers entiers avaient été détruits et que les infrastructures et les installations principales s’étaient effondrées ou étaient lourdement endommagées. Les hôpitaux, les banques, les ministères et les commissariats avaient été touchés, sans oublier la prison de laquelle des milliers de détenus s’étaient enfuis après le séisme.

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Le chaos régnait dans la ville, les habitants erraient dans les rues, sans accès aux services et produits de base tels que l’eau, la nourriture et les soins de santé. Les pillages et les incendies étaient fréquents ; ni l’État ni la police ne maîtrisaient la situation devenue apocalyptique. J’ai séjourné quelques semaines en Haïti chez un ami italo-haïtien dont la maison, bien qu’ayant subi des dégâts, ne s’était pas effondrée. Mon ami et sa famille avaient eu la chance de s’en être sortis sains et saufs. Nous dormions tous dans la cour, redoutant les nombreuses répliques. Malgré la tragédie, ou peut-être justement à cause de celle-ci, j’ai tout de suite été frappé par la gentillesse et la dignité du peuple haïtien. Ce sont ces émotions que j’ai essayé de refléter dans mes photos. Après ce premier voyage en Haïti, j’ai ressenti le besoin de continuer à couvrir les conséquences du séisme : j’y suis retourné en mai 2010, pendant la saison des pluies. Les tempêtes torrentielles rendaient la vie quotidienne des sans-abri (estimés entre 1 et 1,8 million) encore plus difficile. Les personnes évacuées vivaient dans des villes de tentes installées là où on trouvait de la place, sans eau, ni sanitaires, ni services de santé. Les travaux de reconstruction n’avaient pas encore débuté, mais de nombreux Haïtiens étaient rentrés chez eux, où des glissements de terrain avaient fait de nouvelles victimes. Ces conditions ont inévitablement fait monter les tensions et la colère, donnant souvent lieu à des affrontements avec les forces de l’ordre. Mon dernier voyage en Haïti remonte à novembre 2010 pour couvrir les élections présidentielles. Fin octobre, le coup de grâce avait été porté : une épidémie de choléra s’était déclarée dans le pays, faisant quelque 5 000 victimes. Les hôpitaux, déjà surpeuplés, ne pouvaient pas répondre à une telle urgence et empêcher la propagation de la maladie. Grâce à leur solidarité et à leurs fortes croyances religieuses et mystiques, les Haïtiens continuent leur lutte malgré les tragédies qui s’abattent sur leur pays.

Riccardo Venturi

Riccardo Venturi

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