L’Antarctique est une terre extrême, le lieu le plus aride, venteux et froid de la planète. Avec des températures pouvant atteindre les - 89°C et une pluviométrie de moins de 5 cm par an, cet immense territoire grand comme deux fois l’Australie supporte l’un des écosystèmes les plus simples de notre Terre. Seuls les invertébrés peuvent y survivre à l’année, le résident permanent le plus grand étant un moucheron ne dépassant pas 10 mm de longueur. Son étendue est recouverte presque en totalité d’une épaisse couche de glace représentant près des trois-quarts des réserves en eau douce de la planète ; pourtant, l’Antarctique est aussi aride que le désert du Sahara. Elle ne compte aucune population humaine autochtone.

Mais l’Antarctique accueille cependant une population de 8.000 personnes en été, pour la plupart des scientifiques s’intéressant à son plateau polaire et à son riche environnement côtier, ainsi que 1.200 personnes en hiver. Aujourd’hui, il y a plus de touristes que de chercheurs en Antarctique – ils sont au nombre de 15.000 chaque année.

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Sept nations – l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Chili, l'Argentine, la France, le Royaume-Uni et la Norvège – ont exprimé des revendications territoriales, mais celles-ci furent invalidées par le Traité de l'Antarctique signé en 1959. Le traité stipule que seules sont autorisées les activités strictement pacifiques, principe devant être respecté par tout membre des Nations Unies y menant des recherches scientifiques. Les années 80 virent un très grand nombre de pays établir des bases en Antarctique, dans l'espoir que soit signé un accord minier ; pendant ce temps, Greenpeace, ainsi que d'autres associations de protection de l'environnement, luttaient pour que soit accordé au sixième continent le statut de Parc Mondial.

L'opinion publique s'érigea contre l'exploitation minière à la suite du naufrage de l'Exxon Valdez au large des côtes de l'Alaska et du paquebot Bahia Paraiso au large de la Péninsule Antarctique. Un moratoire interdisant toute activité minière pendant cinquante ans fut signé en 1991. Paradoxalement, on ne sait que très peu de choses sur les ressources minérales dans cette région, puisqu'une calotte glaciaire recouvre la presque totalité du continent.

Les chasseurs de phoques commencèrent à exploiter la faune marine dès le XIXème siècle, et provoquèrent la quasi-extinction des phoques et des éléphants de mer. Au XXème siècle, après avoir mis à sac l'Arctique, les pêcheurs de baleines se rabattirent sur l'Antarctique et, bien qu'elles soient aujourd'hui protégées, quatre espèces de baleines manquèrent de disparaître complètement. De nos jours, la pêche illicite de la légine menace non seulement cette espèce de poisson mais provoque aussi la mort de plus de 100.000 oiseaux de mer chaque année. Certaines espèces d'albatros risquent également l'extinction.

Mais il existe d'autres menaces dont les répercussions sont plus difficiles à évaluer, telles que l'appauvrissement de la couche d'ozone. Chaque année pendant quatre mois, un "trou" de la taille des Etats-Unis s'installe au-dessus de l' Antarctique.

C'est ici, sur ce territoire le plus glacial de la planète, que le réchauffement de la planète progresse le plus vite. Depuis cinquante ans, la Péninsule Antarctique, longue de près de 1.300 km, s'est réchauffée de 2,2° Celsius en moyenne, gagnant même jusqu'à 5,5 degrés en hiver. La banquise qui se forme au nord en hiver s'est réduite comme peau de chagrin, à tel point que les populations de krill, qui se nourrissent des algues contenues dans la glace, sont en danger. Et le krill étant le premier maillon de la chaîne alimentaire en Antarctique, les manchots, les phoques et les baleines sont également menacées.

L’Antarctique n'est pas aussi isolée qu'on voudrait le croire.

Maria Stenzel

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Mark Thiessen
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