Avoir des relations sexuelles entre adultes de même sexe est considéré comme un délit, voire un crime, dans 77 pays du monde. C’est ce qu’Amnesty International appelle l’homophobie d’État. En Afrique, où plus de 30 pays disposent de lois répressives, l’homosexualité est ignorée, instrumentalisée ou stigmatisée par des gouvernements arguant notamment que la population ne veut pas de « ces gens-là » pour des raisons culturelles. Ce serait une pratique déviante importée d’Occident, totalement étrangère au continent africain. Ce à quoi des activistes rétorquent que ce n’est pas l’homosexualité qui a été importée mais l’homophobie, d’abord par le colonisateur, puis par des courants évangélistes américains radicaux.

Depuis des années, Frédéric Noy documente la vie de la communauté LGBTI* dans plusieurs pays d’Afrique de l’Est aux législations radicalement différentes : Burundi, Rwanda et Ouganda.

En 2009, le Burundi révise son Code pénal dans le but d’interdire « les relations sexuelles entre personnes de même sexe », l’article 567 prévoyant une peine maximale de deux ans de prison et/ou une amende pouvant atteindre 100 000 francs burundais (64 dollars US).

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Dans le même temps, en décembre 2009, le Parlement rwandais rejette une modification du Code pénal visant à sanctionner l’homosexualité. Le ministre de la Justice déclare même que « l’orientation sexuelle relève de la vie privée ».

De son côté, l’Ouganda tente régulièrement de durcir sa législation. Votée furtivement et nuitamment en décembre 2013, la loi dite « Kill the gays » (« Mort aux gays ») est retoquée par le Conseil constitutionnel quelques mois plus tard, pour absence de quorum. Depuis, la loi anti-sodomie du Code pénal de 1950 élaboré sous le régime colonial britannique est de nouveau en vigueur. Mi-avril 2016, Rebecca Kadaga, présidente du Parlement, a promis de repartir en croisade contre les gays.

Victimes de violences physiques, psychologiques ou sociales, les LGBTI africains luttent quotidiennement contre un tabou enraciné et sévèrement puni par leurs proches. Au mieux, ces derniers nient la réalité, au pire, les rejettent. Dans des pays sans aucune protection sociale, révéler son homosexualité condamne à l’isolement social. Trouver un travail, une maison, un sens à son existence tutoie alors l’impossible. Lors d’un rassemblement saluant l’avènement d’une loi anti-gay, le président ougandais Yoweri Museveni a qualifié les homosexuels d’ekifire : les demi-morts, en luganda (famille des langues bantoues).

La survie passe par une stratégie schizophrénique : vivre masqué pour vivre en paix. Cependant, des activistes refusent tout désaveu. Déterminés à lutter pour leurs droits, ils ne se résignent pas à vivre dans la peur. Rassemblant leur courage et poussés par une foi inébranlable, ils encouragent les membres de la communauté LGBTI à se montrer et à défier la société.

Frédéric Noy

* LGBTI : lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués.

Frédéric Noy

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