Installé depuis plus de deux mille ans sur les terres d’Anatolie et de Perse, le peuple kurde a une histoire singulière. Sa terre existe : le Kurdistan.

Elle s’étend sur les plaines et plateaux anatoliens jusqu’aux monts Zagros, mais les contours de ce vaste territoire, grand comme la France, n’ont jamais été reconnus par aucun État. Sa langue est très ancienne : le kurde. De souche indo-européenne, elle est proche du persan, distincte de l’arabe et du turc, puis s’est ramifiée en plusieurs dialectes, mais sa pratique donne toujours lieu à de vives persécutions.

Sa culture ancestrale est vivante. Au fil du temps, elle a su se métisser avec les cultures perse, arabe et ottomane, mêler les religions du zoroastrisme et de l’islam, mais elle reste la culture d’une « minorité ethnique » bafouée. Une terre, une langue, une culture… Et pourtant, en ce début de XXIe siècle, les 40 millions de Kurdes du Moyen-Orient constituent le plus grand peuple au monde sans État.

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Avec le journaliste Olivier Piot, nous avons parcouru ces terres du Kurdistan pour cerner les raisons de ce paradoxe de l’Histoire. Nous avons sillonné les villes et villages kurdes de Syrie, d’Irak et de Turquie, où notre route a croisé celle de Kurdes exilés d’Iran.

Douze voyages au total pour observer les modes de vie, écouter les espoirs et les rêves, entendre les frustrations et les souffrances de ce peuple « oublié ». Car partout où nous sommes allés, les Kurdes nous ont livré un même sentiment : celui d’appartenir à un peuple « sacrifié » par l’Histoire.

Certes, ce n’est pas le seul peuple dans ce cas, loin s’en faut. Mais depuis plusieurs siècles, des grands empires (ottoman et perse) à la naissance des nations modernes, l’histoire des Kurdes est une succession implacable de drames humains et d’impasses politiques.

Au XXe siècle notamment, alors que la carte géopolitique de cette région du monde a été entièrement redessinée, puis fragilisée à plusieurs reprises, jamais les Kurdes n’ont obtenu la reconnaissance de leur terre et de leurs droits. Presque un siècle après la promesse non tenue par les Alliés, en 1920, de laisser naître un « grand Kurdistan » au Moyen-Orient, les Kurdes luttent toujours.

À l’exception de l’Irak, où des Kurdes contrôlent depuis 1992 une région autonome, au nord du pays, c’est bien la lutte de tout un peuple pour ses droits identitaires et démocratiques qui se poursuit.

Julien Goldstein Remerciements à la Fondation Lagardère et à *Geo * France

Julien Goldstein

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