Des émeutes qui ont agité son pays, la Turquie, il y a deux ans, à la guerre civile en Syrie ou à la révolution ukrainienne, cet autodidacte du reflex s’est fait une spécialité de résumer les conflits et les drames en saisissant les visages de leurs acteurs.

Bülent Kiliç, photographe turc né en 1979, a débuté sa carrière comme journaliste pour la presse locale. En 2003, il devient reporter-photographe et rejoint l’AFP comme pigiste deux ans plus tard. Basé à Istanbul, il est actuellement responsable de la couverture photo pour la Turquie.

À plusieurs reprises, il traverse la frontière pour couvrir la guerre en Syrie. « J’y ai appris à me protéger, à envoyer des photos sans le confort d’Internet », se souvient Bülent Kiliç. « Souvent, prendre une photo n’est rien, c’est réussir à l’envoyer le plus important. »

Bülent Kiliç est aussi le témoin de la bataille acharnée que se livrent les forces kurdes et les djihadistes du groupe État islamique (EI) pour le contrôle de la ville de Kobané. Depuis la frontière turque, il parvient à saisir la violence du conflit avec un cliché spectaculaire : un homme sur une colline qui court pour échapper à une frappe aérienne contre une position du groupe État islamique, à Kobané, et qui lui vaudra un prix au World Press Photo 2015.

En juin 2015, c’est depuis Akçakale, à la frontière turco-syrienne, que Bülent voit la ville syrienne de Tall Abyad au cœur d’une féroce bataille entre le groupe État islamique qui la tient et les forces kurdes qui cherchent à la reprendre. Des milliers de personnes fuient les combats, mais le 10 juin, après avoir laissé entrer plus de 13 500 habitants de Tall Abyad, les autorités turques ferment la frontière.

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Samedi 13 juin, les forces turques emploient des canons à eau et tirent des coups de feu en l’air pour essayer de les repousser loin de la clôture.

Le lendemain, il revient au poste-frontière et s’attend à voir autant de monde que la veille du côté syrien, mais il n’y a personne. Soudain, il voit apparaître quelques personnes au sommet d’une colline. « Au début, je me dis qu’il s’agit juste de villageois qui passent dans le coin. Mais d’autres individus font leur apparition, puis d’autres. Bientôt, ce sont des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants, portant des sacs avec leurs effets personnels, qui surgissent de derrière la colline et déferlent vers la frontière. » Tout cela se produit en l’espace de cinq minutes.

Bülent Kiliç a été récompensé par le Prix Bayeux-Calvados des correspondants de guerre, l’Association des Photographes de la Presse Nord-Américaine (NPPA), le China International Press Photo Contest (CHIPP) ainsi que par le magazine Time et le Guardian qui l’ont désigné photographe d’agence de l’année. Il est lauréat 2015 du 1er prix de la catégorie « Spot News » du World Press Photo pour la photo d’une jeune femme qui venait d’être blessée lors d’affrontements entre police et manifestants à Istanbul en 2014, ainsi que le 3e prix dans cette catégorie pour l’image de la frappe aérienne à Kobané, en Syrie, en octobre 2014.

Bülent Kiliç

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Photo credit: Cem Tekel
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